Progressivement, la notion de « qualité de vie » au travail s’est installée comme une évidence, à la fois pour les collaborateurs en quête d’un sens à leur vie professionnelle, ainsi que pour les entreprises à la recherche d’optimisation ou de réinvention de leurs modèles d’affaires, donc de croissance.
Du côté des collaborateurs, l’attente nouvelle pourrait se résumer ainsi : « On ne vient plus dans l’entreprise pour gagner sa vie, on vient dans l’entreprise (ou on la crée) pour réussir sa vie ». Cela engendre une forte croissance du nombre de création d’entreprises aux formats divers : du plus « light » (freelances, auto-entrepreneurs) au plus « structuré » (SASU, SAS). C’est aussi générateur de nouveaux comportements comme celui des « Slashers » qui cumulent CDI à temps partiel, freelance, SASU, …
Du côté des entreprises, notamment des plus grandes, les challenges à relever sont nombreux : intégrer les nouveaux outils digitaux, transformer en opportunité les nouveaux modes de travail, adapter leur organisation et leurs méthodes de management vers plus de collaboratif, … L’objectif est clair mais complexe : accueillir et retenir les meilleurs talents, pour réussir à innover voire disrupter leurs modèles d’affaires.
Plus spécifiquement pour les acteurs du secteur de l’immobilier, cette (r)évolution prend une dimension autre. Puisque leurs clients (entreprises comme particuliers) se transforment, l’immobilier qui les accueille, les nourrit, les loge, aussi ! Nous sommes entrés dans l’ère de la « consommation immobilière », touchant progressivement les lieux de travail, de restauration, de repos, … Associée à l’urbanisation croissante de la population, la pression sur les fonciers et actifs premiums est forte et durable.
Le coût de la matière première (l’immobilier) allant croissant, la notion de partage grandit et développe des réflexes communautaires. L’économie du Produit cède la place à l’économie de la Connaissance (Big Data, IA) … puis à celle de l’Emotion (Expériences). Au-delà de ses qualités techniques, le bâtiment proposera une véritable « expérience de vie » pour les utilisateurs, ce qui conditionnera sa valeur pour les bailleurs.
Ce besoin « d’expériences de vie » nouvelles et très évolutives révèle l’ampleur du challenge pour les acteurs de la filière immobilière aujourd’hui très séquencée (bailleur et asset manager, promoteur et constructeur, property manager, facility manager, conseil utilisateurs, broker) comme du service (hôtelier, grande restauration, conciergerie d’entreprise, crèche, …). De fait, de nouveaux opérateurs transverses, créateurs d’expériences, ont émergé, tant dans le coworking (Wework, Nextdoor) que dans l’hôtellerie (Citizen M), le coliving (Babel Community), … et ce n’est que le début.
Le raccourcissement de la chaîne de valeur réduit les frontières et ouvre les marchés à des acteurs nouveaux et internationaux. L’accès aisé au financement leur permet ensuite des prises de position rapides et massives.
Dans ce contexte, l’ensemble des professionnels de l’immobilier cherchent à faire évoluer leur proposition de valeur. Faut-il innover ? Faut-il disrupter son modèle ? Les deux sans aucun doute.
Tout d’abord, disrupter : c’est permettre de compléter son offre « traditionnelle » par une proposition « décalée », tout en continuant à optimiser ce que l’on sait bien faire.
La démarche d’innovation permet, en partant du modèle d’affaires initial, d’optimiser son offre et de préserver son avantage concurrentiel : c’est une démarche « défensive » mais indispensable.
La démarche de disruption est complémentaire de la première. En partant des « zones de friction » perçues par le client, que des solutions traditionnelles n’ont pas su résoudre, il est possible d’inventer une nouvelle offre, portée par un nouveau modèle d’affaires. La disruption est la croissance de demain. C’est une démarche « offensive » qui nécessite souvent d’être « exfiltrée » pour se développer hors des process qui ne lui correspondent pas.
La disruption n’est pas plus coûteuse que l’innovation mais le ROI n’est pas de même nature. L’innovation trouve son ROI dans un EBIT préservé ou optimisé. Risque faible pour un ROI souvent faible mais nécessaire. La disruption trouve son ROI dans la valorisation des nouvelles structures créées, surtout à l’ouverture du capital à un tiers. Risque fort pour un ROI élevé et globalement une promesse de forte croissance.Les acteurs de l’immobilier sont sous pression. Nous sommes entrés dans l’ère de la consommation immobilière … et ce n’est que le début !
Philippe Morel, co-fondateur – Président de Dynamic Workplace.